Congrès Extremophiles 2006 : aux frontières de la vie…

Paris, le 18 septembre 2006

Du 17 au 21 septembre 2006, se tiendra au Palais des Congrès du Quartz à Brest, le congrès Extremophiles 2006. Entamée en 1996 à Estoril, cette série de conférences bisannuelles est consacrée aux organismes dits extrêmophiles : des espèces qui ont la particularité de vivre dans des conditions mortelles pour la plupart des autres organismes.
Une occasion unique pour les 350 scientifiques internationaux réunis, dont Christian de Duve, Prix Nobel de Physiologie et de Médecine, de faire un bilan des dernières avancées de la recherche dans ce domaine fascinant.

Cette 6ème édition du congrès, présidée par Joël Querellou, chercheur à l’Ifremer, a également pour vocation d’« étendre les frontières » de sa thématique puisque « Extremophiles 2006 » abordera tous les aspects liés aux micro-organismes se développant aux frontières du vivant.

Qui sont-ils ? Où vivent-ils ?
Ces micro-organismes ont tous en commun de vivre dans des conditions extrêmes : à des températures proches ou supérieures à 100°C, on les dit hyperthermophiles, ou inférieures à 0° C donc psychrophiles, ceux ne se développant que dans des conditions de pression exceptionnelles baptisés piézophiles, ceux qui se développent dans les milieux très chargés voire saturés en sel : les halophiles, dans les milieux basiques : les alcalophiles, ou radioactifs pour les radio-résistants… Certains d’entre eux, appelés poly-extrêmophiles, cumulent même plusieurs de ces caractéristiques !
Ces espèces proviennent d’environnements variés : de la mer, à proximité de sources hydrothermales sous-marines, mais aussi des sédiments, des glaces de l’Antarctique, des eaux saturées en sel (comme la Mer morte), des gisements pétroliers, etc.

De l’origine de la vie… sur terre comme ailleurs
Toutes les recherches menées sur les extrêmophiles, constituent autant de « mondes à découvrir », tous très prometteurs.
En terme de biodiversité d’abord, ces formes de vie, a priori « inimaginables », montrent que l’inventaire de toutes les espèces vivant sur terre n’est pas prêt d’être fini.
Par ailleurs, l’existence de ces micro-organismes relance les débats sur l’origine de la vie sur Terre, certains scientifiques formulant l’hypothèse d’une origine à haute température tandis que d’autres plaident pour d’autres conditions de milieu. Une partie du séminaire sera donc consacrée à cette problématique. Christian de Duve exposera notamment ses travaux sur les processus chimiques potentiellement à l’origine de la transition entre le minéral et le vivant. Ses recherches consistent à comprendre comment des molécules « inertes » pourraient s’organiser et aboutir ainsi à des formes plus complexes.

Par ailleurs, les micro-organismes extrêmophiles sont une illustration des capacités étonnantes d’adaptation du vivant, ce qui renforce l’hypothèse de formes de vie sur des planètes considérées jusqu’à présent impropres au déroulement de processus similaires . Un domaine de la biologie, appelé exobiologie, s’appuie notamment sur les particularités des micro-organismes extrêmophiles pour établir des modèles potentiels d’apparition de la vie sur les autres astres.

Les scientifiques commencent également à étudier une partie du monde vivant tout à fait surprenante : la biomasse souterrain. Il s’agit en fait des micro-organismes découverts dans les sédiments des plaques océaniques, au fond de la mer. Plus étonnant, les scientifiques continuent à découvrir des microorganismes vivants à mesure qu’ils explorent des zones plus profondes au delà du kilomètre sous le fond des océans.

Des enseignements au croisement de plusieurs disciplines
Il est admis actuellement que les êtres vivants peuvent être classés en 3 domaines : les bactéries1 ou eubactéries, les archées ou archéobactéries2 et les eucaryotes3. Selon certains scientifiques, à chacun de ces taxons auraient pré-existé des virus. C’est pourquoi l’étude des virus des environnements extrêmes pourrait apporter des informations fondamentales sur les premières formes de vie.

L’étude de ces microorganismes singuliers vient régulièrement enrichir et parfois bouleverser nos connaissances en matière de biodiversité ou d’écologie, nos notions communes d’évolution, ou encore celles relatives au métabolisme et à la physiologie.
Ces domaines de recherche vise notamment à comprendre les mécanismes permettant à ces microorganismes, non seulement de tolérer, mais de préférer des conditions de milieu telles que des températures de 100°C ou des pH de 0,5 ou 12 selon les espèces.
L’ensemble des constituants cellulaires de ces microorganismes sont confrontés à des conditions extrêmes et présentent des adaptations structurelles et fonctionnelles que le congrès passera en revue.
Les particularités des extrêmophiles offrent également des perspectives en termes d’applications biotechnologiques. Les protéines et les enzymes issues des extrêmophiles constituent en effet un marché en plein développement dans le domaine des biotechnologies et de la biocatalyse. Certaines molécules découvertes chez les alcalophiles sont par exemple, déjà utilisées dans la fabrication de détergents.
Organisé sous le patronage de l’ISE (International Society for Extremophiles), le comité d’organisation local comprend l’Ifremer, l’Institut Universitaire Européen d’Etudes Marines de l’Université de Bretagne Occidentale (IUEM/UBO), l’Institut Polaire (IPEV), le CNRS et a reçu le soutien de Brest Métropole Océane, du Conseil Général du Finistère et de la Région Bretagne, de l’Institut Français de la Biodiversité et des sociétés Proteus et MPBiomedicals.
Pour plus d’informations : http://www.extremophiles2006.org 
1. Les eubactéries constituent le premier domaine du vivant. Ce sont des procaryotes (absence de noyau) qui possèdent des propriétés communes, distinctes des archées, pour leurs membranes et leurs génomes. De nombreuses bactéries sont pathogènes.
2. Les archéobactéries constituent le second domaine du vivant. Ce sont aussi des procaryotes possédant des membranes cellulaires plus résistantes et des génomes apparentés. Ainsi le mécanisme de réplication de l'ADN des archées est-il plus proche de celui des eucaryotes que de celui des bactéries. Aucune archée n’a pour l’instant manifesté de pathogénicité pour l’Homme.
3. Les eucaryotes constituent un groupe d'organismes unicellulaires ou pluricellulaires définis par leur structure cellulaire plus « évoluée » que celle des procaryotes (les archéobactéries et les eubactéries). Les eucaryotes possèdent en particulier des organites divisant l’espace cellulaire en zone dont la fonction est définie, tel que le noyau.