Mieux connaître les habitats marins : plus de 300 poissons suivis à la trace grâce à un réseau de télémétrie acoustique
Dans le cadre du projet européen Fish Intel réunissant des équipes françaises, anglaises et belges, l’Ifremer réalise depuis le mois de mai des missions de marquage de bars, de lieus jaunes et de langoustes sur les côtes bretonnes et normandes avec l’appui des pêcheurs locaux. Scientifiques et pêcheurs ont également déployé, avec l’aide de France Energies Marines, un réseau de 60 récepteurs acoustiques pour suivre les déplacements de ces 3 espèces d’importance et identifier leurs habitats préférés. Ces nouvelles informations seront utiles pour mieux gérer les activités humaines en mer telles que la pêche ou le développement de parcs éoliens.
Depuis une dizaine d’années, la télémétrie acoustique est de plus en plus utilisée pour mieux connaître et comprendre les relations qu’entretiennent les poissons avec leur environnement.
« Grâce au projet Fish Intel, nous saurons bientôt comment les bars, les lieus jaunes et les langoustes utilisent leurs habitats de part et d’autre de la Manche, quels sont leurs espaces de vie, où ils vont se nourrir, grandir et se reproduire, explique Mathieu Woillez, chercheur Ifremer en halieutique au sein de l'UMR Decod nouvellement créée et co-pilote du projet. Grâce à ces données, nous pourrons par exemple mieux quantifier la connectivité entre le parc naturel marin d’Iroise et la réserve naturelle des Sept-Iles et savoir dans quelle mesure ces espèces fréquentent les installations d’énergies marines renouvelables. Autant d’informations qui contribueront à améliorer la gestion des populations de poissons en Manche ».
Plus de 300 poissons suivis et bientôt 50 langoustes
Entre les mois de mai et juin 2022, l’Ifremer a organisé en collaboration avec des pêcheurs locaux, des agents de la réserve naturelle des Sept-Iles et des comités des pêches, trois campagnes de marquage de lieus jaunes et de bars européens dans les Côtes d’Armor, la baie de Seine et la mer d’Iroise. Les scientifiques ont réussi à marquer 233 bars (106 à Perros-Guirec, 77 à St Vaast-la-Hougue et 50 à Ouessant) et 71 lieus jaunes (14 à Perros-Guirec, 1 à St Vaast-la-Hougue et 56 à Ouessant).
L’Ifremer et France Energies Marines, avec la collaboration de pêcheurs locaux et des développeurs de parcs éoliens en mer, ont également déployé 52 récepteurs acoustiques sur le fond en mer d’Iroise et dans les Côtes d’Armor. Dans la baie de Seine, 8 récepteurs ont déjà été déployés par France Energies Marines et une dizaine d’autres seront bientôt installés par l’Ifremer.
Des opérations de marquages de 50 langoustes sont en cours autour de l’île de Sein et de Ouessant et de la réserve naturelle des Sept-Iles. A ce jour, 20 individus ont été marqués.
Chaque marque est unique et émet un signal acoustique qui lui est propre. Ce sont ces signaux que les récepteurs acoustiques enregistrent dès qu’un poisson ou langouste marqués passe à proximité.
« La télémétrie acoustique a l’avantage d’enregistrer en continu les données de présence des poissons marqués et de mesurer notamment la température sur le fond, souligne Mathieu Woillez. En combinant ces informations, nous pourrons non seulement améliorer notre modèle de reconstruction de trajectoire des poissons mais aussi comprendre les effets de l’environnement sur les déplacements individuels, et in fine sur les changements de distribution des populations ».
Ces marquages s’inscrivent plus largement dans un réseau de télémétrie acoustique opéré par l’ensemble des partenaires de Fish Intel, pour lequel 242 récepteurs ont été déployés en Angleterre et 75 en Belgique dans le cadre du projet et de projets précédents. A ce jour, les équipes anglaise et belge ont marqué 68 langoustes, 30 thons rouges, 196 bars, 64 dorades grises et 10 lieus jaunes. Les premiers résultats sont attendus en début d’année 2023.
A propos. Le projet de recherche « Fish Intel » a commencé en 2021 et se poursuivra jusqu’en 2023. Il est conduit par l’Université de Plymouth et regroupe 12 partenaires anglais, français et belges, dont côté Français, l’Ifremer, l’université de Bretagne Occidentale, France Energies Marines, le Comité départemental des pêches maritimes et des élevages marins du Finistère, le Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Normandie et la Ligue de protection des oiseaux (réserve naturelle nationale des Sept îles). Il est financé par le Fonds européen de développement régional (FEDER) via le programme Interreg France (Manche) Angleterre. Plus de précisions sur le site du projet: https://fishintel.ifremer.fr/