Le stress masculinise les poissons
Une femelle qui devient mâle, c’est assez courant chez les jeunes poissons. Plus que la température, c’est le stress qui en est la cause, comme le signale un article scientifique publié aujourd’hui dans la revue Trends in Ecology and Evolution. Le phénomène doit encore être démontré pour le bar : des tests ont lieu actuellement à la station expérimentale de Palavas-les-Flots pour réduire le niveau de stress et augmenter ainsi la part de femelles dans les élevages.
Un article publié aujourd’hui dans Trends in Ecology and Evolution dresse un bilan des études scientifiques concernant l’impact du stress sur la détermination du sexe, en comparant différentes espèces de vertébrés : poissons, reptiles, oiseaux et mammifères. La clé des études recensées est le suivi d’une hormone produite par les animaux en cas de stress, le cortisol pour la majorité des poissons et mammifères et la corticostérone pour les reptiles et oiseaux.
Chez les mammifères comme chez les oiseaux, le déterminisme du sexe est génétique. Mais pour d’autres vertébrés comme les poissons et les reptiles, les facteurs environnementaux peuvent influencer le sexe des individus. « Nous nous sommes récemment aperçus que chez les poissons, tous les facteurs environnementaux pouvant être perçus comme stressants conduisent à la masculinisation des individus chez les différentes espèces étudiées. Par exemple la forte température, la densité ou l’acidité de l’eau », précise Benjamin Geffroy, chercheur en physiologie-écologie au laboratoire Ifremer de Palavas-les-Flots et membre de l’unité mixte de recherche Marbec.
Modifier la température, la luminosité ou la densité pour réduire le stress
La pisciculture peut tirer avantage de ce phénomène. En effet, les femelles, souvent minoritaires dans les élevages de bars, ont la préférence des producteurs. Elles présentent de bien meilleurs taux de croissance que les mâles. L’impact de la température de l’eau est un critère déjà bien identifié, avec une masculinisation accrue aux fortes températures. Une faculté déjà mise à profit dans le cadre d’un projet européen intitulé Sushifish qui a permis de proposer aux professionnels un protocole avec différentes températures d’élevage selon le développement des larves.
Seulement les producteurs préfèrent éviter l’eau froide, qui ralentit la croissance des larves. « Heureusement, la température n’est pas le seul critère, souligne Benjamin Geffroy, c’est un facteur de stress parmi d’autres. » D’où l’intérêt de suivre particulièrement l’hormone du stress, en fonction de la température mais aussi du pH de l’eau, de la luminosité ou de la concentration de poissons dans les bassins. Une expérimentation a ainsi été lancée en mars à la station de Palavas dans le cadre du projet 3S (Seabass, sex and stress). Trois conditions sont testées, dans des lots de bacs contenant des larves de bars. Les premiers sont soumis à une lumière bleue, plus apaisante pour les poissons. Dans les deuxièmes, la nourriture est enrichie en triptophane, précurseur de la sérotonine, l’hormone du bonheur. Enfin, la densité des larves est amoindrie dans les troisièmes.
Compléments sur le communiqué de presse ci-contre.