Quel est l’effet des vagues sur la fonte de la banquise ?

Une série de mesures inédites va être menée dans les cinq prochaines années. Sous-marins, canot à glace, avion et satellite seront ainsi déployés au niveau de l’estuaire du fleuve Saint-Laurent et de l’océan Arctique, dans le cadre du projet ERC WAAXT mené par Peter Sutherland, chercheur au Laboratoire d’océanographie physique et spatiale (LOPS – Ifremer/UBO/CNRS/IRD).

Les vagues qui frappent la banquise peuvent fragiliser la glace mais peuvent aussi contribuer à l’épaissir. De plus, en fondant, la banquise laisse place à la mer libre et donc à un champ de vagues de plus en plus important.

Afin de mieux comprendre l’effet des vagues sur la banquise, Peter Sutherland veut multiplier les données : « Jusqu’ici, beaucoup d’études théoriques ont été menées sur le sujet. Mais très peu de campagnes ont eu lieu sur site, en mer, pour valider les outils de calcul. » Pour combler cette lacune, il a décroché une bourse jeune chercheur de 2 millions d’euros sur une période de cinq ans, versée par le Conseil européen de la recherche (ERC). Seules cinq bourses de ce type ont été obtenues par des chercheurs français en 2018 dans le domaine des sciences de la terre. Le projet s’intitule WAAXT, comme Wave-modulated Arctic Air-sea eXchanges and Turbulence.

Les premières campagnes de mesure auront lieu dans un laboratoire naturel développé depuis 2014 par l’Institut des Sciences de la mer de Rimouski, de l’Université de Québec. Il s’agit d’une baie instrumentée proche de l’institut, un cadre idéal pour étudier des processus de petite échelle et tester de nouveaux instruments dans une zone contrôlée et accessible dans des conditions qui ressemblent à l’Arctique. Puis, les avancées faites dans ce laboratoire, côté scientifique et ingénierie, seront appliquées aux expériences à plus grande échelle dans l’océan Arctique.

Dans le cadre du projet WAAXT, des mesures innovantes vont être déployées à toutes les échelles, du kilomètre au centimètre. Trois petits sous-marins autonomes équipés de capteurs sillonneront la couche limite océanique, sous les vagues et sous la glace, tandis que des mesures par avion et par satellite permettront de mesurer les vagues et la banquise. En complément, les scientifiques courront à bord d’un canot à glace pour mesurer les propriétés mécaniques de la glace (vidéo ci-dessus).

Originaire du Canada, Peter Sutherland, a fini sa thèse sur la turbulence et les vagues en 2013 aux Etats-Unis (Scripps Institution of Oceanography à San Diego). Il a ensuite effectué un post-doctorat à Sorbonne Université sur l’interaction entre les vagues et la banquise. Il est arrivé à l’Ifremer en tant que chercheur en océanographie physique en octobre 2015. Pour mener à bien son projet, il va pouvoir s’entourer d’une équipe de deux doctorants et deux post-doctorants