Du 24 au 30 novembre

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En route pour le site SPG11, notre avant dernière escale localisée plus au sud. Le temps se gâte, avec des rafales de vent et une forte houle. Malgré la météo peu clémente, le pipe est abaissé jusqu’à 5000 mètres de fond. Les premières carottes arrivent malheureusement vides ou plutôt remplies d’eau de mer. La houle (environ 5 mètres) est probablement en cause. Après 14 heures de mise au point et d’essais infructueux, l’équipe de forage parvient à extraire une carotte de sédiment exploitable. Celle-ci arrive sur le pont.

Le site SPG11 est la dernière station située en bordure du gyre Pacifique sud. Ce site correspond à la transition entre le centre du gyre, extrêmement oligotrophe, et l’extérieur du gyre beaucoup plus riche en matière organique. Il est donc d’une importance capitale pour les scientifiques embarqués. D’ailleurs, la stratégie d’échantillonnage est plus complexe que précédemment et demande plus de temps. Elle engendre parfois de longues discussions.

Les choses s’accélèrent pour les microbiologistes avec des changements de dernière minute dans le programme. En effet, les sous échantillons doivent maintenant être prélevés aussitôt que les carottes arrivent sur le pont, afin d’avoir les échantillons les plus « frais » possibles pour l’analyse géochimique.

Les géochimistes s’empressent de mesurer les concentrations en oxygène dissous. Puis les carottes sont transférées dans la chambre froide pour y être sous échantillonnées. A peine le temps de découper le dernier tronçon de carotte pour l’analyse microbiologique et le bateau remonte déjà les thrusters et le train de tubage. Mais la journée n’est pas terminée. Il nous faut maintenant conditionner et traiter les carottes. Certaines carottes sont également sous-échantillonnées dans des conditions anaérobies afin de les préserver d’un contact prolongé avec l’oxygène qui pourrait être létale pour certaines bactéries dites anaérobies strictes (voir focus). Nous voilà donc en route pour notre destination finale, le site SPG12, qui représente notre site de référence qui est situé en dehors du Gyre. Avant notre retour au port d’Auckland en Nouvelle Zélande, dans un peu moins de deux semaines, Il y a encore beaucoup de choses à finaliser. Et l’équipe à bord doit déjà remballer une partie des caisses de matériel et songer au rapatriement des échantillons dans de bonnes conditions.

Focus

Comment étudie-t-on l'écologie microbienne ?

Pendant de nombreuses années, la microbiologie sera basée sur le principe de l’enrichissement des microorganismes, puis sur leur isolement dans des milieux de culture artificiels au laboratoire. Les cultures d’enrichissement favorisent le développement des microorganismes en fonction des conditions physico-chimiques et nutritionnelles du milieu. La fraction de bactéries qu’il est possible de cultiver en souches « pures » (i.e. formant une colonie sur une boite de pétri) est extrêmement limitée par rapport au nombre de bactéries que l’on peut dénombrer dans l’environnement par microscopie. Pourtant, les microorganismes incultivés représentent la majorité de la biodiversité d'un environnement, et leur rôle et fonction dans l’écosystème est encore inconnu. Par exemple, la fraction cultivable peut varier de 0,001% dans le milieu marin à 15% dans les boues activées.

Pendant les deux dernières décennies, les méthodes moléculaires, particulièrement le séquençage du gène codant pour la petite sous-unité du ribosome (ARNr 16S), sont devenues très populaires pour aider à identifier les bactéries inconnues et étudier la diversité microbienne.

La métagénomique est un nouveau domaine scientifique qui analyse les microorganismes environnementaux incultivés. Lorsque l'échantillon est prélevé, on y extrait l'ADN de tous les microbes vivants dans un échantillon naturel et on analyse les génomes entiers. Le but est d'arriver à identifier les fonctions et les séquences des génomes de ces microorganismes, afin de pouvoir inféoder la fonction et le rôle de ces microorganismes dans un environnement naturel. Bien entendu, l'informatique joue un rôle important dans cette recherche en procurant des outils rapides et efficaces et en permettant l'analyse d'une quantité considérable de données.