Le merlu : une histoire entre avis de tempêtes et accalmies
Poisson particulièrement prisé des français, le merlu a parfois payé au prix fort sa popularité sur les étals. Ce prédateur nocturne établi le long des côtes atlantiques et méditerranéennes s’est maintenant largement rétabli dans le Golfe de Gascogne et l’Atlantique nord mais son déclin reste préoccupant en Méditerranée…
En 1999, les scientifiques tirent la sonnette d’alarme : la santé du merlu de l’Atlantique nord (hors eaux ibériques) est chancelante avec un effondrement des recrutements, c’est-à-dire des juvéniles qui apportent du sang neuf à une population chaque année, associé à une baisse des poissons reproducteurs.
« La morale de l’histoire est toujours la même : on ne peut pas indéfiniment trop pêcher à la fois les petits et les gros poissons ! »
Alain Biseau, biologiste marin à l’Ifremer
« La principale cause identifiée de ce déclin était les captures très importantes de tout petits merlus - qu’on appelle les pointes bic - et plus globalement d’une proportion très conséquente de poissons qui ne s’était pas encore reproduits (80% des captures). À cela s’ajoutait le développement d’une pêcherie au large dirigée sur les adultes reproducteurs (au filet et à la ligne), rappelle Alain Biseau, biologiste marin à l’Ifremer et chargé de l’évaluation scientifique de l’état des populations pêchées en France. La morale de l’histoire est toujours la même : on ne peut pas indéfiniment trop pêcher à la fois les petits et les gros poissons ! »
Plus de merlus et toujours plus au Nord !
Devant ce constat alarmant, la Commission Européenne a décidé d’un plan d’urgence en 2001 pour tenter d’inverser la tendance. Les voies d’amélioration ont porté sur une meilleure sélectivité des chaluts avec un maillage plus large des filets (100 mm au lieu de 70 mm) et une série d’innovations sur les engins (panneaux à maille carrées par exemple). Sur avis scientifiques, les TAC (Totaux Admissibles de Captures) ont également été divisés par 2 par les instances politiques européennes et nationales. Au fil du temps, des limitations de l’effort de pêche ont été instaurées et l’utilisation de filets interdite au-delà de 200 mètres de profondeur au large des îles britanniques et irlandaises.
Les efforts consentis ont fini par porter leurs fruits avec un rétablissement de la population dès 2005, qui a explosé depuis à des niveaux jamais observés auparavant. La biomasse est aujourd’hui 5 fois plus importante que celle estimée en 2008, et on pêche maintenant du merlu jusqu’en Norvège ! Une évolution aidée aussi par le changement climatique, favorable au regain du merlu dans la zone. Aujourd’hui le scenario du déclin se répète pour le merlu de Méditerranée : l’expérience en Atlantique a montré qu’avec des mesures de gestion appropriées un épilogue heureux est encore possible.