Déduction & Ressac : contrer les épidémies chez les crevettes
Des épidémies affectent régulièrement les élevages de crevettes bleues (Litopenaeus stylirostris) en Nouvelle-Calédonie. Deux espèces de bactéries du genre Vibrio (V. penaeicida et V. nigripulchritudo) entraînent des mortalités importantes dans les bassins de crevettes en grossissement pendant la saison fraîche et la saison chaude.
Comprendre la maladie pour aider à la gestion des bassins et contrer les épidémies
Les objectifs des projets Déduction (Développement durable de la crevetticulture, traitement de l’information et observatoire du système en Nouvelle-Calédonie) et Ressac (Ressources et écosystèmes aquacoles en Nouvelle-Calédonie) sont de comprendre le contexte multifactoriel contribuant à l’apparition des maladies dues à des bactéries (Vibrio) et connaître les mécanismes de virulence de ces bactéries, afin d’apporter de l’aide à la gestion des bassins de grossissement et contrer la maladie.
Les bactéries Vibrio provoquent spécifiquement des maladies lorsque les crevettes sont dans les bassins de grossissement. Les mortalités apparaissent plus particulièrement lors de l’eutrophisation des milieux, c’est-à-dire l’accumulation de nutriments, sans que les facteurs favorisant la virulence des Vibrio soient bien identifiés. Les Vibrio envahissent très rapidement la crevette, notamment l’hémolymphe, et entrainent leur mort par septicémie.
Identifier les facteurs de la maladie et les gènes liés à la virulence des bactéries
Quinze souches de l’espèce de bactérie Vibrio nigripulchritudo ont été étudiées pour identifier les gènes liés à leur virulence et établir leur relation de parenté. Par ailleurs, les interactions hôtes - Vibrio ont été étudiées au niveau de l’animal, cellulaire et moléculaire. De plus, les facteurs favorisant la multiplication des Vibrio et l’expression de la toxine sont recherchés.
Un gène responsable identifié ?
Selon sa virulence, le Vibrio nigripulchritudo contient un, deux, voire aucun plasmide (ADN circulaire, en plus de l’ADN chromosomique). Deux plasmides ont été retrouvés dans toutes les souches hautement pathogènes. Un des plasmides contient un gène qui code une toxine très toxique pour les arthropodes, embranchement dont font partie les crevettes. Cependant, le gène impliqué dans la production de cette toxine n’est probablement pas le seul responsable de la virulence des Vibrio, d’autres gènes jouent potentiellement un rôle et restent à identifier. L’autre espèce responsable des épidémies, Vibrio penaeicida, possède un gène similaire, mais dont le rôle n’a pas encore été défini.
Microbiote, système immunitaire et conditions d'élevage : 3 facteurs à l'étude
Un projet de recherche est en cours pour déterminer les relations entre le microbiote des crevettes (c’est-à-dire l’ensemble des microorganismes qui vivent en interaction avec elles), y compris les Vibrio pathogènes, l’état du système immunitaire des crevettes et les conditions d’élevage, notamment l’eutrophisation des milieux. Le but est de comprendre l’impact du microbiote et son évolution en fonction des conditions d’élevage et les risques de développement des Vibrio pathogènes, en prenant en compte l’état immunitaire des crevettes. Les scientifiques espèrent également identifier des microorganismes bénéfiques, capables soit de stimuler le système immunitaire, soit de combattre les bactéries pathogènes.