DREAM Antilles : diversifier la pisciculture marine en Martinique
Introduite aux Antilles en 1985, l’ombrine ocellée (Sciaenops ocellatus) est l’unique espèce de poisson marin élevée dans ce territoire. L’Ifremer a accompagné le développement de la filière, par la mise au point des techniques d’élevage de cette espèce, particulièrement en matière de contrôle de la reproduction et de génétique. L’institut assure encore la gestion des reproducteurs et la fourniture de larves aux écloseries, en attendant le transfert de ces compétences à une structure technique locale sous l’égide de la collectivité. Les travaux de recherche s’orientent désormais vers la diversification de la pisciculture, en privilégiant des espèces autochtones.
Le projet DREAM Antilles (Diversification aquacole et recherche sur les espèces autochtones marines des Antilles) a pour objectif de diversifier les espèces de poisson marin exploitées dans les Antilles et d'identifier des espèces locales adaptées à l’élevage dans des fermes artisanales ou semi-industrielles.
Les performances d’élevage de l’ombrine ocellée en Martinique et en Guadeloupe sont satisfaisantes, tant au niveau de la reproduction, de l’élevage larvaire que du grossissement des juvéniles. Il n’y a donc plus de travaux de recherche menés par l'Ifremer en lien avec cette espèce. En revanche, l’institut continue de gérer le stock de reproducteurs et de fournir les larves aux écloseries privées. Un cycle de formation a démarré en 2014, pour permettre à trois personnels hors Ifremer de prendre en charge la gestion des reproducteurs et la production des larves. Malheureusement celui-ci n’a pas pu aller à son terme en raison de difficultés rencontrées par les partenaires pour pérenniser le financement de ces personnes. À terme, il est prévu la création d’un Centre d’application aquacole régional, dépendant de la Collectivité territoriale de Martinique.
Diversifier les espèces aquacoles aux Antilles
Le projet DREAM Antilles s’est déroulé en deux grandes phases :
- Une première a consisté à réaliser une synthèse des informations disponibles sur les espèces candidates à l’élevage.
- La seconde phase avait pour objectif de faire des tests préliminaires sur certaines des espèces retenues, afin de réaliser une première évaluation de leur potentiel aquacole.
La sélection des candidats
En concertation avec les acteurs des filières aquacole et halieutique, il a été décidé que les espèces à tester devaient répondre à un certain nombre de critères : être indigènes, avoir un bon potentiel sur le marché local, être adaptées à l’élevage en mer tel qu’il se pratique dans les Antilles françaises (pas d’espèce d’eau douce ou dangereuse, exploitation de taille artisanale à semi-industrielle), ne pas entrer en compétition avec la pêche régionale, et présenter de bonnes dispositions pour l’élevage en cage (potentiel de croissance, comportement en captivité, résistance aux agents pathogènes…).
65 espèces appartenant à 18 familles correspondent à ces critères. Un ensemble de fiches par familles a été produite, pour synthétiser les connaissances acquises sur leur biologie.
Des tests d'élevage préliminaires
La mise en œuvre des tests d’élevage préliminaires a mis en lumière des difficultés pour se procurer les espèces intéressantes, de provenance sauvage, et encore plus d’élevage. Seules six espèces ont pu être obtenues et pour certaines, le nombre d’individus capturés n’était pas suffisant pour tirer des conclusions fiables.
Les premiers résultats disponibles suggèrent que les capacités d’adaptation à la captivité sont très différentes d’une espèce à l’autre, y compris au sein d’une même famille. Les difficultés rencontrées concernent surtout l’alimentation, la manipulation, l’endormissement ou la sensibilité aux agents pathogènes.
À titre d’illustration, une des espèces testées, le carangue coubali (Caranx crysos) est pratiquement impossible à anesthésier sans mettre en danger sa survie. Sa manipulation est extrêmement délicate et cause des lésions, qui le rendent sensible aux maladies infectieuses, avec des mortalités quasi systématiques. À l’opposé, le croupia roche (Lobotes surinamensis) est très rustique, placide en captivité et résistant aux manipulations. Cette dernière espèce a un bon potentiel de croissance, qui semble même supérieur à celui de l’ombrine ocellée.
Poursuite du projet
Les données recueillies doivent être complétées, notamment pour les espèces qui n’ont pas pu être testées faute d’individu disponible. Un projet (Diamant) a été déposé auprès du Fond européen pour les affaires maritimes et la pêche pour continuer les recherches. Il se focalise sur la constitution de stocks de reproducteurs afin de pouvoir mener des travaux sur le contrôle de la reproduction de deux des espèces les plus prometteuses, le vivaneau sorbe (Lutjanus analis) et le croupia roche (Lobotes surinamensis). La réponse à cet appel à projet est attendue pour le mois de janvier 2020.